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L'inclassable personnage public Jean Nohain plus connu comme homme de radio et surtout de télévision est né Jean-Marie Legrand à Paris le 16 février 1900.
Surnommé de tous temps 'Jaboune', il a pris comme pseudonyme le nom d'emprunt de son père Franc Nohain, poète, librettiste, homme de théâtre et auteur de nombreux ouvrages.
Il baigne dans la musique et le spectacle puisque sa mère est pianiste amateur, et amie d’hommes de lettres et de musique dont les visites au salon l'imprègnent plus qu'il ne le croit. Pour n'en citer qu'un : Maurice Ravel, amie de sa mère, crée en 1907 "l’Heure Espagnole" avec son père Franc Nohain.
Chacune des biographies compulsées ne donne qu'une facette de cet homme généreux et multiple. Qui le dit parolier, qui scénariste, qui avocat et journaliste, et qui, pour mettre tout le monde d'accord, "avocat de la chanson". Il fut tout cela, et encore n'en aurait-il rien été, qu'il aurait tout de même droit au Panthéon des rues pour sa défense de la Patrie, exprimée au cours des deux guerres mondiales.
Toutefois, au départ, il préfère être avocat, mais muni de son bac, il doit interrompre ses études. Animé d'un profond patriotisme, il participe à la première Guerre mondiale, et sert même sous les ordres du maréchal polonais Pisuldski investi de pouvoirs dictatoriaux, pour une campagne de libération de la Pologne qui ne se terminera qu'en 1920.
Sous ses aspects bonhomme, Jean Nohain s'est battu comme un lion lorsqu'il le fallait pour défendre la paix mondiale et La "Douce France" chantée plus tard par Charles Trenet. Le devoir accompli, il n'en badinera ensuite que mieux avec la vie.
De retour à Paris, il entreprend des études de droit et entre au barreau, où il sera avocat de 1921 à 1925. Sa curiosité et son enthousiasme ne trouvent pas à se satisfaire de cette situation librement choisie.
Dès avant la guerre, son père s’est tourné vers le journalisme et dirige "L’Echo de Paris". Jean Nohain l’y rejoint en 1925 pour créer la page enfantine du titre. Il fait une découverte enivrante de la presse et sous son surnom d’enfance, "Jaboune", il gravit les échelons de la notoriété journalistique de la presse écrite, car la même année une émission radiophonique qui consiste à faire reconnaître des bruits lui vaut une mise à pied lorsqu'il se trouve que le bruit du jour est celui d'une chasse d'eau...(Le fameux impair du journaliste qui fait un faux pas ne date pas d'hier mais peut-être Jean Nohain sur les ondes balbutiantes en a t-il la paternité !).
En 1929, il se lance seul dans l’aventure d’un journal pour la jeunesse : "Benjamin". Une réussite qui le consacre cependant qu’il collabore notamment à "Bonjour dimanche" et "C’est la vie". La même année la radio lui sourit avec son frère, l'acteur Claude Dauphin lorsqu'il anime une émission de variétés au Poste de la Tour Eiffel. Sur la lancée, suivront les émissions "En correctionnelle" (l'avocat n'est pas encore très loin), "Les enfants chantent", et les premiers radio-crochets.
Là c'est le milieu musical, la chanson qui le rattrape, s'impose à lui et l'impose.
Mireille, (Mireille Hartuch, 1906-1996) , la chanteuse à la voix fluette mais attachante et lui, forment un duo resté étonnement moderne. De nombreux succès naissent de leur complicité et le célèbre "Puisque vous partez en voyage" repris il y a peu par Françoise Hardy et Jacques Dutronc donne une idée imparfaite de l'engouement des auditeurs de l'époque qui ne pouvaient pas se disperser comme aujourd'hui sur un aussi large spectre de genres vocaux. Mireille compose et il écrit. Mireille voulait être actrice de théâtre, et les écrits de Jean Nohain ont plus été teintés jusque là de références aux lois et à la prose journalistique qu'au divertissement poétique. L'alchimie prend pourtant et d'autres bluettes solidement implantées dans le patrimoine de la chanson française nous restent avec bonheur : Qu'il s'agisse du "petit chemin" (qui sent la noisette), du vicomte qui rencontre un autre vicomte, de "Fermé jusqu'à lundi" ou de "couchés dans le foin" (avec le soleil pour témoin),"Papa n'a pas voulu" (et maman non plus) la France de l'entre deux guerres et ses congés payés savoure un répit qu'on ne saurait lui reprocher.
Mireille, propulsée au faîte de la popularité, reçoit dans son « Salon » radiophonique sur "le Poste Parisien" , le Tout Paris du music-hall, du sport, de la politique, et Jean Nohain se fait à sa nouvelle double casquette d'homme de radio et d'auteur de chansons à succès qu’entonne Mireille en premier lieu, mais aussi, Ray Ventura et ses Collégiens, Charles Trenet, Maurice Chevalier, et d'autres interprètes en vue à l'époque. La guerre vient stopper cette belle ascension pacifique...
Pour la deuxième fois, Jean Nohain part au combat, mais il est blessé et bénéficie d'un répit. Il tourne alors avec une troupe de chanteurs tout en continuant à travailler pour la Radio Nationale depuis Marseille ("Bonjour la France" et "Bonsoir la France").
Pourtant, il décide de rejoindre Londres après l'occupation de la zone sud en 1942. Le 23 août 1944, c’est sur un char de la Division Leclerc qu’il retrouve Paris. Fidèle à son ardente fibre patriotique, il s’attache passionnément à libérer son pays et n’est démobilisé qu’en 1945.
Sa joie de vivre est inoxydable et il a encore quelques textes insouciants à rajouter à sa casquette d'auteur : "Parce que ça me donne du courage" (Sans chanson pas de coeur au boulot) avec une musique de Mireille toujours présente échoie à Henri Salvador, tandis qu'Yves Montand trouve "une demoiselle sur une balançoire"
Dans le même temps, la carrière de Jean Nohain passe par les ondes et Radio Luxembourg, avec des émissions phare comme "Reine d'un jour", télé-réalité radiophonique avant l'heure, où les jeunes femmes malmenées par la vie se racontent pour la consolation d'être peut-être désignées comme "Reine du jour".
Au début des années 50, il écrit aussi quelques nouvelles pour le journal Spirou. Jean Nohain n'est pas passé d'un genre à l'autre, il n'a cessé de rajouter des cordes à son arc, semant partout son humeur bon enfant.
La télévision l'appelle ensuite dès 1952 avec la célèbre émission de variétés "36 chandelles" qui sera jusqu'en 1958 fréquentée par toutes les célébrités de l'époque. Jean Nohain sera un des premiers à faire confiance à Fernand Raynaud. Mais de temps en temps raconte le fils de Fernand Raynaud, Jean Nohain pris dans l'ambiance de ses émissions et répétant inlassablement "C'est merveilleux ", ou "mes chers petits " avait tendance à l'oublier, alors il rentrait directement sans lui demander son avis ".
N'ayant jamais perdu son âme d'enfant, il se produira encore dans les années soixante et co-animera des émissions pour la jeunesse dont j'ai personnellement gardé le meilleur des souvenirs,
D'une vie aussi riche portée 81 ans, il laisse deux livres de souvenirs:
"J’ai cinquante ans", Paris : Julliard, 1952.
Et "La traversée du 20e siècle", Paris : Hachette, 1966.
En 1992, Yvonne Germaine, semble avec "Notre ami Jean Nohain", Paris, aux éditions de L’Harmattan la seule a avoir esquissé la vie de cet étonnant personnage qui se voulait résolument optimiste sur le genre humain :
"Les ennemis, ça n'existe pas. Ce sont des gens avec qui l'on n'a pas encore déjeuné."
Une grande biographie reste encore à écrire selon les journalistes de France-Inter qui dans l'émission "Les greniers de la mémoire" diffusée tous les dimanches de 11h à 12h30, lui ont rendu le 25 janvier 2004, jour du 23e anniversaire de sa disparition un hommage d'où est tirée cette biographie.
Jean Nohain repose au cimetière parisien du Père Lachaise auprès de son père Franc Nohain et de son frère Claude Dauphin, non loin d'Alphonse Bertillon, le criminologue premier utilisateur des empreintes digitales et de Courteline, ce qui lui sied mieux.
Pour en savoir plus :
http://www.radiofrance.fr/rf/musee/glossaire/fiche.php?numero=6
Pour découvrir une autre facette de Jean Nohain habile à jouer avec les mots, ce site où plusieurs essais de rimes particulières, les babelines, vous étonneront :
http://www.bric-a-brac.org/lettres/babebines.php
La Plaque du Jour a été photographiée à Paris par Frédéric, un ami internaute, et présente la particularité, pour ne pas dire l'anomalie d'ignorer le terme générique de la voie qui lui est consacrée à Paris ! Il s'agit d'une rue, modeste. Tout autant que distrait, Jean Nohain l'était aussi.
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